C’est ce qui est écrit sur la brochure du ministère de la Sécurité publique qui est donnée aux sinistrés des inondations du printemps 2019.
Savez-vous ce que cela veut dire? Moi je sais. Maintenant je
sais. Et je suis prêt à parier que je ne suis pas le seul, à en juger par
la grogne qui se fait entendre un peu partout chez les sinistrés.
Cela veut dire ensemble trouvons un moyen de ne pas indemniser les sinistrés.
Et quand je dis ensemble, je veux parler des assureurs, du ministère de la Sécurité publique et des municipalités.
Cela veut dire ensemble trouvons un moyen de ne pas indemniser les sinistrés.
Et quand je dis ensemble, je veux parler des assureurs, du ministère de la Sécurité publique et des municipalités.
La sécurité publique
100 jours après avoir été inondé, la décision vient de tomber. « Vous
ne serez pas indemnisé. » Disait une voix laconique sur mon répondeur
téléphonique. Raison. « Il n’y avait pas d’eau sur le terrain. »
Ça, je le savais. C’est moi-même qui lui ai dit au représentant du
Ministère de la sécurité publique à sa première visite. Même si c’était évident, j’ai ajouté que la
propriété était située en zone rurale et qu’il n’y a pas de réseau
d’égout. J’ai aussi précisé, ce que tout
le monde savait, que nous avions eu beaucoup de neige cet hiver et des pluies
abondantes ces derniers jours. Une combinaison
d’évènements qui a provoqué, selon moi, l’inondation de mon sous-sol. Soit par
infiltration soit parce que cela a fait monter le niveau de la nappe phréatique.
Plus tard j’ai réexpliqué toutes ces choses dans les formulaires de
réclamations du Ministère de la Sécurité publique.
Partant de là, les représentants du ministère en savaient assez pour me
dire que je ne pouvais pas être pas indemnisé. Pourquoi? Tout
simplement parce que les critères d’indemnisation avaient dû être établis au
préalable, ils ne pouvaient pas les ignorer. Me faire remplir des
formulaires de réclamation, entreprendre des démarches et me demander des
preuves photographiques devenait inutile en plus de me donner de faux
espoirs. Toute cette démarche n’était qu’une perte de temps, quand j’en
avais déjà plein les bras à essayer de réparer au plus vite pour reprendre le
cours de ma vie.
Et que dire du message laisser sur mon répondeur. Une telle
décision aurait au moins mérité qu’on fasse l’effort de me parler de vive voix
pour m’expliquer les tenants et aboutissants. Non pas pour changer la décision,
mais pour montrer un minimum d’empathie. Plus frustrante encore, fut la raison invoquée dans
la lettre qui a suivi l’appel téléphonique. Il était dit cette fois que je ne
serai pas dédommagé, non parce qu’il n’y avait pas eu d’eau sur le terrain, mais
parce que les dommages étaient relatifs à un refoulement d’égout.
En lisant
ça je me disais, mais qu’est-ce qu’ils ont bien pu écrire dans leur rapport,
les représentants du ministère qui sont venu chez moi à trois reprises? Et l’agent chargé de mon dossier au Ministère
de la Sécurité publique…a-t-il vraiment lu les documents que je lui aie
envoyés?
Comme
vous pouvez l’imaginer, je n’ai pas manqué de lui téléphoner en quête
d’explications. Malheureusement je suis tombé sur son répondeur et mon message
est resté vain, car il n’a jamais daigné me rappeler. Je suppose que pour lui, la
décision ayant été rendue, il était temps de fermer le dossier sans autre
explication ni perte de temps. Voilà comment on fait
les choses au ministère de la Sécurité publique. Chacun appréciera.
L’assureur
Que faites-vous lorsque vous êtes victime d’un sinistre? Si vous
êtes assuré, votre premier réflexe est d'appeler votre assureur avec la
confiance d’être indemnisé. Avec la prime que vous lui versez chaque
année, c’est bien le moins. Erreur! Le prix que vous payez n’a rien
à voir avec la couverture. Pris d’un doute vous vous dites que vous auriez
peut-être dû lire les petits caractères et les avenants, vous savez ce jargon que
personne ne peut comprendre. Mais le
plus sournois pour vous disqualifier c’est ce message d’introduction que vous
entendez lorsque vous appelez votre assureur. «Cet
appel pourrait être enregistré à des fins de formation et de qualité»,
méfiez-vous. Il ne dit pas tout ce à quoi il pourrait servir. Votre
conversation est effectivement enregistrée et conservée.
C’est ce que ma compagnie
d’assurance a fait avec moi. J’aurais dit dans une conversation qui
remonte à plus de 7 ans, un mot ou une phrase (je n’ai pas eu le loisir
d’écouter l’enregistrement), qui lui a donné une excuse pour ne pas
m’indemniser. Il n’y a pas à dire, les compagnies d’assurance ne laissent
rien au hasard. Et pour info, la dernière fois que je suis allé voir un
agent d’assurance à son bureau, la première chose qu’il m’a dite c’est " notre
conversation va être enregistrée." Ils ne se contentent plus d’enregistrer
les appels téléphoniques. Voilà qui en dit long sur le niveau de confiance des
compagnies d’assurance envers leurs clients. Des pratiques qui renforcent
la croyance populaire à l’effet que vous êtes assurés pour payer les primes,
mais qu’en cas de réclamation, on ne vous laisse que les yeux pour
pleurer. Et c'est sans parler des lettres qui se terminent par
« vous êtes au cœur de nos préoccupations » quelle hypocrisie.
Les
municipalités
Pour les maisons qui sont
inondées à répétition, dans bien des cas c’est de leur faute aux municipalités.
Après tout ce sont elles qui délivrent les permis de construire. Pour
ma part j’ai pu voir au fil des ans, plusieurs constructions se dresser en
pleine zone inondable, notamment deux résidences pour personnes âgées
qu’on a laissé construire au cœur du village là où tout le monde sait que le
risque d’inondation est grand. Mais qu’attendait la municipalité pour y
interdire la construction ? Que le gouvernement intervienne ? Il
semble que oui. Par bonheur c’est maintenant chose faite, puisque le
gouvernement a adopté un décret le 15 juillet dernier pour encadrer les types
de permis et autorisations municipales pouvant être émis pour les
propriétés incluses dans les zones inondables. Je viens de recevoir un
feuillet explicatif de la municipalité, expliquant aux les citoyens quoi faire
lorsqu’ils se trouvent injustement inclus dans cette zone. Par contre on ne
leur donne que dix jours pour déposer une demande de retrait.
Pour ma part je ne blâme pas
la municipalité pour avoir été inondée. C’est un fait exceptionnel et ne suis
pas dans une zone inondable. Par contre, d’avoir dit à la
municipalité que j’avais été inondé était loin d’être une bonne idée.
J’ai dû assister impuissant au défilé des autorités venues de toutes parts :
Pompier, inspecteur municipal, policier. Pourquoi un
policier ? Pour voir si je faisais quelque chose d’illégal?
C’est vrai que ça lui donnait une bonne raison de pénétrer chez moi sans
mandat de perquisition. Et que dire de l’inspectrice municipale qui,
après coup, me téléphone pour savoir où j’en étais. Les choses vont bon train
lui dis-je. J’ai tout nettoyé et
maintenant je répare. Mais vous ne pouvez pas faire ça me dit-elle. Va pour le nettoyage, ça fait partie des
travaux d’urgence, mais pour le reste vous devez attendre qu’on vous donne le
feu vert. » Le feu vert ? Mais les gens qui sont venus
chez moi m’ont dit que tout était OK, puisque l’eau n’avait causé aucun dommage
structurel. Vous n’avez pas lu le rapport de l’inspecteur ? Non, mais
quoiqu’il vous ait dit vous devez avoir un permis de la municipalité.
Délivrez-moi en un dans ce cas. Mais Monsieur,
ça ne marche pas comme ça, vous devez prendre rendez-vous. Donnez-m’en un.
Vous devez attendre votre tour qu’on puisse vous recevoir. Imaginez, vous êtes
chez vous, à essayer de vous sortir la tête de l’eau pendant que ceux qui sont
supposés vous supporter tentent de vous la renfoncer avec tout leur arsenal de
procédures pour le moins discutables. Et
pour le permis, sortez votre portefeuille, la municipalité ne fait pas de
cadeau. Délivrer un permis gratuit pour la circonstance aurait été un début d’aide,
mais bon. Avec le recul, je
me rends compte que sut été plus simple, plus rapide et moins coûteux si je
n’avais rien dire à personne.
ZIS ANNEXE 2
Délimitation de territoire inondé par
les crues printanières de 2017 et 2019 Zone d’Intervention Spéciale modifiée
Des riverains du lac Ontario craignent de nouvelles inondations
Mise
à jour du 25 novembre 2019
Aujourd’hui, pour moi, tout
ceci n’est plus qu’un mauvais souvenir. Mais
ce n’est pas le cas de tous les sinistrés. Et pour ceux qui en subissent encore
les conséquences, je suis de tout cœur avec eux.
À terme cette expérience m’a
fait réfléchir sur les causes de ces inondations. Et j’ai découvert que nous
n’avons pas fini d’être inondés. Et contrairement à ce qu’on essaie de nous
faire croire, la principale raison n’est pas le climat, mais une mauvaise
gestion des barrages.
Retirez tous les barrages et
vous supprimez tout risque d’inondation, ou presque.
Pourquoi ? Parce que les
lacs et les cours d’eau ont des niveaux naturels qui varient entre ce que l’on appelle
« la limite des hautes eaux » au printemps et « la limite des
basses eaux » en été. Ces niveaux varient très peu d’année en année. Mais
les barrages viennent changer ces limites puisqu’en retenant l’eau ils font
monter le niveau des lacs en amont et baisser celui des rivières en aval. Donc comme les gens ne peuvent plus se guider
sur la limite des hautes eaux naturelles, ils se rabattent sur la nouvelle
limite créée par les barrages. Et comme celle-ci est plus basse, ils se
rapprochent de la rivière et construisent, sans le savoir, dans une zone à
risque d’inondation.
À part de rares exceptions, tout
allait bien. Mais depuis quelques années on reçoit plus de neige l’hiver et
plus de pluie au printemps. Et cette dernière accentue le problème en faisant
fondre la neige plus vite. Résultat le
niveau des lacs monte plus qu’il ne devrait et pour éviter que les barrages ne cèdent
sous la pression ou que l’eau passe par-dessus, les gestionnaires ouvrent les
vannes en grand. Ce faisant les rivières débordent et inondent les propriétés
riveraines.
Voici maintenant pourquoi je
disais qu’on faisait une mauvaise gestion des barrages.
Vous souvenez-vous du temps où
Hydro Québec craignait de manquer d’eau dans ses réservoirs pour fournir ses
clients en électricité? On était, à
l’époque, dans un cycle où l’on recevait peu de neige l’hiver et pas assez de
pluie au printemps. On peut imaginer que
pour contrer cette tendance Hydro Québec a commencé à laisser ses réservoirs se
remplir en profitant des pluies généralement abondantes en automne. Donc maintenant que la tendance semble
s’inverser on peut penser qu’en ouvrant les vannes des barrages pendant la
saison des pluies automnales, on règlerait le problème. Les niveaux des lacs seraient plus bas et l'on
disposerait d’une marge de manœuvre, s’il fallait qu’on ait encore un hiver
avec beaucoup de neige et un printemps pluvieux.
Bon je sais que tout ça n’est
pas facile, car il y a des intérêts divergents à considérer, mais ne rien faire
n’est pas non plus la solution. D’autant que tout le monde peut voir que la
gestion des barrages qui prévaut actuellement permet peut-être à Hydro Québec
d’engranger plus de profit. Mais comme Hydro Québec est une société d’État,
elle doit retourner une partie de ses profits à l’état sous forme de
dividendes. Et l’État, de son côté, doit sacrifier une partie des dividendes
qu’il reçoit pour indemniser un bon nombre de sinistrés. Si l’on ajoute ça à la détresse vécue par les
sinistrés et le coût des soins de santé qui en découlent, on doit vraiment s’interroger
sur la politique à adopter.
En même temps que je finis
cette mise à jour je vois qu’en Ontario ils s’interrogent aussi sur la gestion
des barrages.